mercredi 3 mai 2017

Revenir à Braddock







1953e jour - Il y a trois ans, au sujet de Braddock, j’écrivais :
Il suffit parfois d’énoncer un chiffre pour comprendre. À Braddock, le chiffre ça pourrait être celui du nombre des habitants : plus de 20 000 il y a trente ans (la sidérurgie était encore vaillante à l’époque), moins de 2 000 aujourd'hui.
À partir d’un tel constat, il est facile d’imaginer le paysage : les planches en lieu et place des portes et fenêtres, les murs qui finissent par s’écrouler, la nature qui imperceptiblement cherche à reprendre ses droits.

Chômage, refuges dans l’alcool ou la drogue, manque, insécurité, délabrements… Et puis, parce que c’est toujours plus complexe qu’un simple effacement : des gens dignes, des gens qui se battent pour leur emploi et leur ville.
À ma façon, je viens de Braddock. Mes grands-parents, mes oncles, mes tantes vivaient en Lorraine du côté de Moyeuvre-Grande. Les hommes travaillaient à l’extraction des minerais. Ils ont pleuré quand les mines ont fermé.
Il m’a fallu du temps pour comprendre, pour comprendre l’amour d’un métier qui pourtant vous tue, pour comprendre les solidarités, l’esprit de famille qui pouvait régner entre italiens d’origine ou polonais.
Je pense à tout cela en me promenant dans ce coin sinistré de Pennsylvanie. Je reconnais les paysages.

Voilà. C’est ce genre de raisons qui font que l’on revient, encore et encore : un besoin viscéral d’avoir des origines.

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