Wagons - Narva

935e jour - Vus du dessus et cadrés serrés, les wagons citernes ressemblent à des flotteurs entassés sur les bords d'une piscine… Bon d'accord, disons des flotteurs couverts de rouille sur les bords d'une piscine abandonnée.

 
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Que sont-ils l'un pour l'autre ? - Narva

934e jour - Ils viennent de se croiser ; ils viennent de se reconnaître. Qui sont-ils l'un pour l'autre ? Qu'ont-ils à se dire ?
Pris par le flot, sans possibilité de s'arrêter (de remonter le temps), on ne peut qu'émettre des hypothèses – se perdre dans tout un lot de conjectures.
 
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L’art de regarder les trains - Narva

933e jour - Ils sont nombreux, les hommes sur Terre a être fascinés par les trains. Mais combien sont-ils à se poser juste derrière un pylône pour les observer alors que l'espace, à droite comme à gauche, est dégagé ?
 
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Concordance des formes - Narva

932e jour - J'aime quand dans la même minute, et en deux points opposés de la ville, je tombe sur des formes – un bassin, un pneu – qui se répondent.
 
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Exercice de pensée - Narva

931e jour - Imaginer à quoi ressemble la ville l'hiver quand il neige.
Imaginer la ville quand gronde un orage.
Imaginer la ville la nuit, à trois ou quatre heures du matin – est-elle pleine de silence ou de bruits lointains de machines ?
Imaginer la ville trente ans en arrière par exemple, alors qu'elle était soviétique. Était-elle radicalement différente ? Et les gens ?
 
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Collisions des architectures - Narva

930e jour - Paysage estonien : côte à côte des usines, des garages, une cathédrale – l’Õigeusu Ülestõusmise Katedraal (cathédrale orthodoxe de la résurrection).
 
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Drôle d'endroit pour un pique-nique - Narva

929e jour - Des barres d'immeubles héritage de l'ère soviétique, des garages en batterie le long de voies ferrées, des friches, une décharge. Et au milieu de tout ça, une étendue d'herbe non tondue avec, en son centre, une tache blanche qui m'intrigue. Alors, je zoome… Et découvre une femme, ses deux enfants.
Ils pique-niquent.
Sans doute habitent-ils la cité juste à côté. Sans doute est-ce l'été – chaleur, envie de dehors… Il n'empêche… Leur présence dans cet espace de rien a quelque chose d'improbable – et, du coup, aussi, d'émouvant.
 
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Un homme au bord de l'eau - Narva

928e jour - L'été, l'homme est là tous les jours.
Il arrive en milieu de matinée. Il reste jusqu'à ce que le ciel rosisse.
Il vient avec sa gamelle, un transistor…
L'homme passe l'essentiel de ses journées seul, regard posé sur le fil de l'eau. Ou sur l'autre rive – là-bas, c'est la Russie. C'est étrange que ce soit un autre pays. Il se sent estonien, c'est sûr, mais russe aussi un peu – ses parents arrivèrent ici peu après la seconde guerre mondiale. Il se voit comme un fils d'immigrés. Il a des attaches…

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Les heures défilent.
Les bateaux se font plutôt rares sur la Narva. Et les poissons tout autant. Mais ce n'est pas très grave, le plaisir est ailleurs…

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Un homme au bord de l'eau.
Sa femme est morte il y a 8 ans déjà. Son fils vit loin. Aux États-Unis, dans la banlieue de Boston. Il a une bonne situation, il est dans les affaires. Il a beaucoup de responsabilités. Il ne peut que très rarement revenir au pays (la dernière fois, c'était il y a deux ans).
De temps en temps, l'homme reçoit une carte, ou une lettre. Son fils régulièrement l'invite, il est prêt à payer le billet.
Il faudrait qu'il aille… Oui, il faudrait qu'il aille.
Il essaye d'imaginer la vie là-bas. Il se demande s'il y a des fleuves, des rivières. Il se demande s'il y a des endroits où s'installer pour pêcher.
 
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Pluie sur New York

927e jour - À l'abri d'un auvent, attendre que la pluie cesse.
S'absorber dans la contemplation de gouttes qui cascadent sur le pare-brise d'une voiture garée juste là.
Laisser son esprit vagabonder.
Frissonner. Mais ne pas bouger pour autant.
 
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Zoom arrière - New York

926e jour - Un jeu : cadrer serré un détail jusqu’à ce que l'on ne puisse imaginer l'alentour.
Et puis entreprendre un zoom arrière, radical, et être presque surpris de découvrir un cadre, un paysage – tout un monde…

 
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Le secret, c'est la lumière - New York

925e jour - Parfois, il n'y a presque rien : une rue, une remorque, des arbres bord-cadre. Rien de bien remarquable. Et pourtant. L'instant se révèle suffisamment rare pour que me vienne l'envie de déclencher.
 
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Où étiez-vous quand Elvis est mort ? - New york

924e jour - Lecture de Psychotic Reactions & autres carburateurs flingués, recueil d'articles de Lester Bangs (collection Souple, éditions Tristram).  Où étiez-vous quand Elvis est mort ? est le titre de l'un de ceux-ci.

Extrait :
J'ai appris la nouvelle de la mort d’Elvis alors que je buvais une bière avec un ami journaliste sur son escalier d'incendie dans la 21e Rue, à Chelsea. C'est un bon quartier ; bien que la folle du dessus le réveille toutes les nuits avec ses délires, mon pote reste là parce qu'il en aime le sentiment de communauté au sein de la diversité : dans son bâtiment, de vieux communistes encartés vivent à côté de gens de toutes sortes, qualifiés par le bon peuple d’“ethniques”. Quand nous avons compris qu'une veillée funèbre s'imposait, alors je suis allé au drugstore pour acheter un pack de bière.

Plus loin, Lester Bangs se souvient du seul concert d’Elvis auquel il ait assisté, c'était à l'automne 71 :
Elvis était là, vêtu de ce ridicule costume blanc qui ressemblait à un château arthurien planté de clous, il était trop gras, et sa boucle de ceinture était aussi grosse que votre tête, à ceci près que votre tête n'est pas en or massif, et dans un tel harnachement tout individu de moindre prestance aurait été l'image crachée d'un Neil Diamond débile, mais sur Elvis ça allait.

Images prises au Trailer Park Lounge, 271 W. 23rd St. New York

 
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Chez le coiffeur - New York

923e jour - C'est du côté de Brooklyn (pas très loin du Brooklyn Bridge). Sur les images qui précèdent, sur celles qui suivent, l'homme sourit…
 
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Un homme qui pisse - Ottawa, Toronto ou Vancouver

922e jour - En ce moment, il m'arrive de sauter d'un endroit à un autre sans nulle part me poser. Je prends le pouls, je prends des images. Je ne reste pas.
Il arrive aussi que plus tard je tombe sur des images sans plus savoir où je les ai faites. C'est le cas de celle-ci : Ottawa, Toronto ou Vancouver, je ne sais plus où je l'ai prise.
 
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Une escale de cinq minutes à peine - Toronto

921e jour - Visite éclair : travaillant sur un projet que je me dois encore de tenir secret, je passe, cinq minutes à peine, par Toronto, juste le temps suffisant pour saisir les traces des derniers vestiges de noël…
Et voilà. Hop, je suis déjà ailleurs.
 
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Rien n'a changé, tout a changé - Fresno

920e jour - Qu'est-ce qui change en deux, trois ans ? Les marques sur les panneaux publicitaires, la hauteur des haies sur le bas-côté, une enseigne sur la façade d'une boutique (Joanna's Fashion à la place de Angela's Boutique, Para la Mujer Moderna).

Ici, une boîte aux lettres a été déplacée : elle était à droite de l'allée, elle est passée à gauche sans trop qu'on ne sache pourquoi. Et le panneau de basket au-dessus du garage quant à lui a tout bonnement disparu.
À grande échelle, ces changements sont pour la plupart infinitésimals, anecdotiques. Et pourtant. Il disent quelque chose du temps qui a passé.

Il y a surtout ces instants vécus, enregistrés, qui définitivement ne seront plus. Exemple ? Un homme, imper noir – silhouette américaine, entre personnage pour chanson de Johnny Cash et film noir des années soixante-dix – qui passe, tête droite, devant un bâtiment sans grand intérêt. La scène est gravée en moi, associée à ce lieu, a cet espace – à tout jamais.
Le bâtiment est toujours là, inchangé ou presque. Mais j'ai beau guetter, j'ai beau chercher alentours, il faut que je me fasse à l'idée : l'homme ne repassera plus.
 
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Le sapin a disparu - Fresno

919e jour - 3355 East Belmont Avenue. Je suis déjà passé par là. Il y a longtemps. C'était au début des aventures Dreamlands (le 3e jour du voyage pour être précis). On était en mai 2010 et le post s'intitulait Autour de Belmont Avenue).

J'avais été ému par un sapin derrière une vitre – “un micro-sapin synthétique derrière une vitre poussiéreuse”.
La maison semblait abandonnée. Elle pourrait l'être tout autant aujourd'hui. Mais il faut croire qu'il y a eu (qu'il y a) un semblant de vie : le sapin a disparu.
Et ce n'est pas le seul changement : la feuille de papier aluminium qui couvrait une partie des vitres tout à côté s'est également volatilisée, ainsi que la grille de fer forgé qui protégeait la porte…

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Une question me vient, bien sûr, alors que je m'apprête à repartir : que restera-t-il de tout cela à mon prochain passage ?
 
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Gens de Fresno

918e jour - La Californie, paradis sur Terre : ses gens à la rue, ses emplois précaires, ses cohortes de gens de peu…
 
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