mercredi 30 juin 2010
Bons souvenirs de Sicile - Palerme (3)
La Via Decolatti à Palerme débute dans ce qu’on est en droit de considérer comme un centre ville : des artères passantes, des immeubles hauts, des commerces nombreux. Mais il suffit de s’y engager pour se retrouver parachuté si ce n’est en pleine campagne tout au moins dans une de ces zones périurbaines que l’on ne croise d’habitude qu’en banlieue lointaine.
Côté gauche de la rue, s’étend un mur recouvert d’un médiocre crépis sur lequel sont régulièrement apposés des panneaux signalant : Zona Militare Limite Invalicabile.
Côté droit, se succèdent des ateliers de bric et de broc. Des mots écrits à la main font la plupart du temps office d’enseignes.
Devant les maisons, des sacs poubelles ou bien encore des tas d’on ne sait quoi.
Plus loin, un panneau La Citadella Del Povero e Della Speranza. Une flèche indique un portail vert derrière lequel semble poindre une chapelle (y a-t-il des touristes qui osent s'aventurer jusqu'ici ?).
Des murs en ruine, Des herbes folles.
Un de ces Père Noël qu’on voit en tous points du globe maintenant, qui grimpe le long d’une façade malgré une chaleur visiblement étouffante.
Un garage grand ouvert dans la profondeur duquel on discerne tout un fatras – du fatras émerge un cheval à bascule.
Et bientôt, des deux côtés de la rue, des plaques de pierre enchaînées, cadenassées. Il s’agit de marbre, semble-t-il, dont on suppose qu’il va servir à l’édification des pierres tombales.
On arrive dans la portion de la rue qui est parallèle aux voies ferrées – celles qui mènent à la Stazione Centrale de Palerme… En face de nous, le mot Liberta, peinture noire, interpelle.
Avançant, on découvre une suite au message. Il est écrit : Liberta Por le Migranti.
La rue fait alors un coude pour devenir le Fondo Picolo. C’est à hauteur d’une casse automobile spécialisée dans les Fiat de petites cylindrées.
La chaussée rétrécit. Elle est cernée maintenant de murets. Les murets sont surmontés d’hostiles tessons de verre qui scintillent dans la lumière d’un soleil déclinant.
Au-delà de l’un des murets moins haut sans doute que les autres, apparaît une friche, une décharge – on ne sait pas – au milieu de laquelle on croit deviner la silhouette incongrue d’un taureau.
Y regardant de plus près, on découvre qu’il s’agit en fait d’un cheval. Mais la présence d’un cheval en ce triste lieu n’est, tout compte fait, guère plus rassurante que celle d’un taureau.
mardi 29 juin 2010
lundi 28 juin 2010
Ritsen vanaf hier - Rotterdam
C’est un panneau sur une autoroute aux abords de Rotterdam. Il semble indiquer qu’il faut se rabattre car les voies diminuent en nombre.
En hauteur, à l’arrière-plan, les caténaires d’une ligne ferroviaire.
Des lignes en tous sens appelées à se rejoindre. Du béton, du goudron, un peu de verdure. Et l'impression au final d'une incroyable quiétude.
dimanche 27 juin 2010
En marge - une phrase de François Maspero
Les passagers du Roissy-Express de François Maspero, page 13, extrait :
Assez de grands voyages intercontinentaux, assez de distances parcourues sans rien voir de plus qu’à travers les vitres embuées du Transsibérien, assez de ciels sillonnés au-dessus des nuages et des océans. Tous les voyages ont été faits. Ils sont à la portée de quiconque peut se payer le charter. Tous les récits de voyages ont été écrits. […] Les étendues secrètes à découvrir, elles étaient là, sous ses yeux, inconnues de ceux-là même qui les traversaient quotidiennement et souvent de ceux qui les habitaient : incompréhensibles espaces désarticulés de ce qui n’était plus une géographie et qu’il faudrait bien essayer de réécrire.
Les passagers du Roissy-Express,
François Maspero, éditions du Seuil, septembre 1990.
Assez de grands voyages intercontinentaux, assez de distances parcourues sans rien voir de plus qu’à travers les vitres embuées du Transsibérien, assez de ciels sillonnés au-dessus des nuages et des océans. Tous les voyages ont été faits. Ils sont à la portée de quiconque peut se payer le charter. Tous les récits de voyages ont été écrits. […] Les étendues secrètes à découvrir, elles étaient là, sous ses yeux, inconnues de ceux-là même qui les traversaient quotidiennement et souvent de ceux qui les habitaient : incompréhensibles espaces désarticulés de ce qui n’était plus une géographie et qu’il faudrait bien essayer de réécrire.
Les passagers du Roissy-Express,
François Maspero, éditions du Seuil, septembre 1990.
samedi 26 juin 2010
D’autres photos de Stephen Shore - Gull Lake

Le constat est sensiblement le même que pour la photo prise à Dryden (message du 19 juin) : le temps est simplement passé. Le goudron est apparu, certains bâtiments ont disparu, des magasins ont fermé ; tout ou presque a été repeint.
Les deux photos de Stephen Shore ont été prises le 18 août 1974 (c’était un dimanche) à Gull Lake, province du Saskatchewan, Canada. Celle du haut a été prise dans Mains
Street ; celle du bas dans Proton Avenue.
Uncommon Places : The Complete Works, Stephen Shore, Aperture editions
vendredi 25 juin 2010
Time-lapse - Animation
L’idée est simple : compiler en un film une série d’images faites au hasard d’une déambulation dans StreetView.
Ils sont quelques uns à avoir posté sur Youtube leurs vidéos. Certains montrent le trajet qu’ils effectuent pour se rendre au travail, d’autres serpentent le long de routes qu’ils estiment pittoresques.
Voici une petite sélection juste pour le plaisir.
Ils sont quelques uns à avoir posté sur Youtube leurs vidéos. Certains montrent le trajet qu’ils effectuent pour se rendre au travail, d’autres serpentent le long de routes qu’ils estiment pittoresques.
Voici une petite sélection juste pour le plaisir.
jeudi 24 juin 2010
Tout voir - Périphérique extérieur
Périphérique extérieur entre Porte des Lilas et Porte de la Villette. Les panneaux au-dessus des voies indiquent : PÉRIPH. FLUIDE – pas d’embouteillages, c’est déjà ça.
Dès le premier instant, on est happé par le flot. Mais pour une fois, on regarde – on peut même ne s’attacher qu’à cela.
Il y a tout ce qu’au volant d’une voiture on n’a pas le temps d’observer attentivement : les têtes des conducteurs ; les véhicules sur les voies
opposées ; les façades des immeubles alentours.
Mais aussi ce qu’on rate, dans la réalité, à cause de la vitesse, de la concentration : des barrières sur le côté, prêtes à s’abaisser ; des caméras de télésurveillance ; des panneaux repliés sur eux-même que l’on pourra déployer en cas de nécessité (je me suis d’abord interrogé, les découvrant, sur le sens à donner à ces demi-cercles, ces demi-triangles).
S’ajoute encore – la caméra étant placée bien plus haut que le toit d’une voiture – tout ce qu’on ne voit jamais : des coquelicots parmi les détritus sur le terre-plein central ; des basketteurs en contre-bas ; ou alors une tente de SDF.
Les surprises s’amoncellent. Parfois elles sont propres au médium comme
cette décapotable étonnamment déformée par l’optique de la camera de la Google Car.
Dès le premier instant, on est happé par le flot. Mais pour une fois, on regarde – on peut même ne s’attacher qu’à cela.
Il y a tout ce qu’au volant d’une voiture on n’a pas le temps d’observer attentivement : les têtes des conducteurs ; les véhicules sur les voies
opposées ; les façades des immeubles alentours.
Mais aussi ce qu’on rate, dans la réalité, à cause de la vitesse, de la concentration : des barrières sur le côté, prêtes à s’abaisser ; des caméras de télésurveillance ; des panneaux repliés sur eux-même que l’on pourra déployer en cas de nécessité (je me suis d’abord interrogé, les découvrant, sur le sens à donner à ces demi-cercles, ces demi-triangles).
S’ajoute encore – la caméra étant placée bien plus haut que le toit d’une voiture – tout ce qu’on ne voit jamais : des coquelicots parmi les détritus sur le terre-plein central ; des basketteurs en contre-bas ; ou alors une tente de SDF.
Les surprises s’amoncellent. Parfois elles sont propres au médium comme
cette décapotable étonnamment déformée par l’optique de la camera de la Google Car.
mercredi 23 juin 2010
Sex can wait - Baltimore (6)
Un panneau publicitaire le long d’Orleans Street à Baltimore.
Dans le bas de l’affiche – sans doute difficilement visible par un automobiliste à moins qu’il ne soit pris dans un embouteillage – est mentionné en guise de signature un site internet, celui du CFOC (Campaign For Our Children, Inc). Je vais jeter un œil pour voir. Je découvre, entre autres, un guide pratique à destination des adolescents (Teen Guide) – je ne résiste pas au plaisir d’en relever certains des titres de sections :
Abstinence : what you need to know
How to talk to your parents about sex !
Test your sex quotient.
mardi 22 juin 2010
Rêver des histoires - Hamilton (2)
Il est des villes qui donnent envie de rêver des histoires. Hamilton, en Ontario, est de celles-là. Peut-être à cause de l’extrême proximité de certaines zones résidentielles avec les usines d’une industrie visiblement lourde. Cela donne à l’espace urbain un côté irréel – on croirait un décors conçu pour une photo de Gregory Crewdson ou mieux encore pour une série télé écrite par David Lynch.
Un îlot, à ce titre, est particulièrement épatant, limité au Sud par Beach Road et au Nord par Whitfield Avenue.
On y découvre, au hasard des pérégrinations, une fillette en maillot de bain bleu et trottinette qui s’arrête, plusieurs images durant, pour discuter avec un Chet Baker démuni et trouble que d’aucun pourraient croire menaçant pour elle – sur une autre image, plus tard, on la verra – sauve ! – rentrer chez elle à quelques maisons de là.
Ou alors trois demoiselles – les héroïnes de notre histoire – qui bronzent sur le toit de leur véranda. L’image est d’autant plus saisissante que l’on repère, observant de plus près, un drapeau serbe devant la maison (on apprendra bientôt qu’environ 8 % des immigrants dans les années 1990 ont déclaré la Yougoslavie comme pays de naissance) mais aussi un fauteuil roulant rangé à proximité de la porte d’entrée dont on se demande forcément s’il appartient à une des trois filles et, si oui, alors comment celle-ci s’est hissée jusqu’au toit.
Poursuivant la balade, on passe devant l’atelier d’un Facteur Cheval local (un des personnages de notre intrigue à n’en pas douter).
On se laisse surprendre par deux paniers de basket contigus (on se dit qu’il faudra les intégrer à l’intrigue).
Et puis, tôt ou tard, on finit par tomber sur des voies ferrées. Elles mènent tout droit jusqu’à un des complexes industriels. Des pipelines, des cheminées, des hauts-fourneaux…
Des maisons, se demande-t-on, que perçoit-on du bruit des machines ?
Un îlot, à ce titre, est particulièrement épatant, limité au Sud par Beach Road et au Nord par Whitfield Avenue.
On y découvre, au hasard des pérégrinations, une fillette en maillot de bain bleu et trottinette qui s’arrête, plusieurs images durant, pour discuter avec un Chet Baker démuni et trouble que d’aucun pourraient croire menaçant pour elle – sur une autre image, plus tard, on la verra – sauve ! – rentrer chez elle à quelques maisons de là.
Ou alors trois demoiselles – les héroïnes de notre histoire – qui bronzent sur le toit de leur véranda. L’image est d’autant plus saisissante que l’on repère, observant de plus près, un drapeau serbe devant la maison (on apprendra bientôt qu’environ 8 % des immigrants dans les années 1990 ont déclaré la Yougoslavie comme pays de naissance) mais aussi un fauteuil roulant rangé à proximité de la porte d’entrée dont on se demande forcément s’il appartient à une des trois filles et, si oui, alors comment celle-ci s’est hissée jusqu’au toit.
Poursuivant la balade, on passe devant l’atelier d’un Facteur Cheval local (un des personnages de notre intrigue à n’en pas douter).
On se laisse surprendre par deux paniers de basket contigus (on se dit qu’il faudra les intégrer à l’intrigue).
Et puis, tôt ou tard, on finit par tomber sur des voies ferrées. Elles mènent tout droit jusqu’à un des complexes industriels. Des pipelines, des cheminées, des hauts-fourneaux…
Des maisons, se demande-t-on, que perçoit-on du bruit des machines ?
lundi 21 juin 2010
dimanche 20 juin 2010
En marge - Une phrase de Bruce Begout
L’éblouissement des bords de route, Bruce Bégout, page 49, extrait :
Celui qui prend le temps d’examiner de quoi son existence quotidienne est concrètement faite en conclut inévitablement que les parkings y occupent une place considérable. Souterrains ou à étages, en épi ou perpendiculaires, ils envahissent chaque vie devenue automobile et répondent à sa propension irrésistible à plébisciter l’identité répétitive par des rectangles bien dessinés où parquer son ennui. Quel que soit l’endroit où l’on se rend, on doit nécessairement passer par un parking. Il forme à présent l’antichambre de toute action urbaine, le passage obligé des déplacements et des entrées.
Pour information, la photo satellite qui figure ci-dessus a été prise dans le centre de Baltimore.
samedi 19 juin 2010
Une photo de Stephen Shore - Dryden
S’il n’y avait pas les poteaux électriques quasiment inchangés, il serait impossible de reconnaître le carrefour. Pas de bouleversements radicaux, non, juste les traces du passage du temps : de nouvelles bâtisses ; des arbres qui ont poussé, des trottoirs là où il n’y avait que bordures de terre et de gravats…
La photo de Stephen Shore date de 1974. Elle a été prise le 15 août à l'angle de Wilde Street et de Colonization Avenue à Dryden, Ontario. C’était un jeudi. Et c’est l’une de ses célèbres Uncommon Places prise lors de l’un de ses multiples périples à travers le continent nord-américain en quête de vie de tous les jours, de lieux ordinaires : parkings, croisements de routes secondaires, motels…
Uncommon Places : The Complete Works, Stephen Shore, Aperture editions
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